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Le récit d'Antoine Girard et Damien Lacaze lors de leur expédition au Pakistan

Antoine Girard est un amoureux du Pakistan qu’il parcourt en parapente lors de vols incroyables. En 2016, il survolait le Broad Peak, à 8 156m. Cette fois, il y est retourné accompagné de Damien Lacaze pour une expérience de vol mais aussi d’alpinisme. Approche raccourcie grâce au parapente puis grimpe vers le sommet, tel est le concept alléchant d’Antoine, mais toujours soumis aux aléas météo. Décollage imminent pour le Nanga Parbat et le Spantik.

12 Octobre 2018

Alpinisme

© Antoine Girard & Damien Lacaze

Un premier périple de 1000 kilomètres en vol bivouac

La première partie de l’expédition a commencé à Skardu pour un périple de 1 000 kilomètres en vol bivouac. Objectif de passage, le Nanga Parbat (8127m), la frontière Afghane par le sud (Chitral), une remontée vers la frontière Chinoise pour la longer jusqu’à Shimshal et finir à Karimabad, pour quelques jours de repos. Nous avons prévu 16 jours d’autonomie complète pour cette section avec des sacs de plus de 35kg au départ.
Les conditions météorologiques sont très bonnes dès les premiers vols, nous essayons de ne pas dépasser 6800m en vol pour respecter la période d’acclimatation. Nous pouvons faire le tour du Nanga Parbat dés le premier jour. Au premier atterrissage Antoine se blesse à la cheville, ce qui conditionne la suite du projet à ne plus avoir à marcher. Il faut maintenant assurer chaque vol et se poser en altitude. Les conditions météorologiques nous obligent à voler légèrement plus au nord que prévu pour rejoindre la frontière Afghane, les plafonds sont plus haut et les orages moins fréquents. La première vraie difficulté, est le passage d'un col à 5600m pour s'approcher de la frontière chinoise. De l'autre côté du col, un fort vent catabatique nous attend pendant 30km et nous oblige à poser, heureusement nous parvenons presque au premier village. Toute cette première section se passe bien et nous montons progressivement de plus en plus haut en vol jusqu’à 7200m et dormons un peu en dessous des 5000m. Le dernier jour nous décidons d’essayer de monter haut en vol et dormir vers 6000m pour parfaire notre acclimatation pour la suite.

© Antoine Girard & Damien Lacaze

À 20m d’un record du monde

Non loin de Shimshal nous trouvons un thermique qui nous monte jusqu’à 7960m, il aurait été possible de dépasser les 8000m car nous nous sommes arrêtés avant la base du nuage mais nous ne connaissions pas notre altitude réelle. (Les instruments donne en temps réel l’altitude GPS compensée par le baromètre, à très haute altitude les données sont forcément faussées. Damien avait 7600m et Antoine 7400m). Nous avons découvert notre plafond réel lors du déchargement des traces sur un ordinateur. C’est tout de même le second plus haut vol de monté en thermique et volontaire réalisé dans l’histoire du parapente après celui d’Antoine sur le Broad Peak à 8157m. Nous étions à 20m du record du monde de gain d’altitude. Le soir nous dormons à 6100m sur un glacier avant de rejoindre Karimabad pour le ravitaillement. Nous récupérons un sac envoyé depuis Skardu avec tout l’équipement d’alpinisme. L’idée est d’aller poser en parapente vers 6300m sur le Spantik (7025m) pour rejoindre le sommet à pied. Antoine envisage cette partie du projet malgré la cheville cassée et en accord avec le médecin, les chaussures d’alpinisme jouent le rôle de plâtre en immobilisant la cheville. Il n’y a que 700m de dénivelé à marcher pour atteindre le sommet.

© Antoine Girard & Damien Lacaze

Une semaine de tente à plus de 6000 mètres 

Le mauvais temps nous fait patienter une semaine. Lors d’une petite fenêtre météo nous arrivons à poser à 6200m et nous bivouaquons à 6500m dans une neige mole et profonde. Nous partons de nuit pour le sommet mais le mauvais temps arrive plus tôt que prévu. A 6h du matin nous sommes à 6900m, le vent souffle fort et la neige commence à tomber. La visibilité se réduit à quelques mètres. Il n’est plus possible de décoller en parapente du sommet, nous renonçons aussi à aller simplement au sommet qui se trouve seulement à 100m avec la météo qui empire. Nous sommes contraints de passer une autre nuit sur la montagne à 6500m. Les prévisions météos sont mauvaises pour les prochains jours et la neige tombe en permanence, le décollage hypothétique en parapente devient délicat avec presqu’un mètre de neige molle. La descente à pied n’est pas envisageable sur cette partie de la montagne. Nos réserves de nourriture et notre état de santé qui se dégrade fortement (Antoine fait un œdème cérébral mais reste lucide) nous oblige à décoller dès que possible pour fuir ce piège. Après 30 nouvelles heures à attendre, nous profitons d’un bon vent de face pour décoller dans le brouillard pour un vol aux instruments. Nous sortons du nuages 5 km plus loin, soulagés. Il reste 35 km de glide pour se poser au premier village. Nous sommes de nouveau bloqués par le mauvais temps à Karimabad pour une semaine. Il ne nous est pas possible de prolonger nos visas qui arrivent à terme comme il était convenu avec l’ambassade. Le Pakistan nous autorise quand même un overstay sans visa de 15 jours.

© Antoine Girard et Damien Lacaze

Baltoro airlines

Au premier créneau météo, nous partons vers le Sud Est. Nous survolons de nouveau le Spantik (sans y poser cette fois) et faisons un vol de 130 km. Jusqu'à l'entrée du glacier du Baltoro. Le surlendemain, nous partons voler dans le Baltoro avec une contrainte de temps et de ne pas poser/marcher à cause de la cheville défectueuse. Sur le premier créneau météo nous nous arrêtons à Concordia au pied du Broad Peak les plafonds ne sont pas assez haut pour se lancer sur les 8000m. Ce repérage nous permet d’évaluer les conditions, la neige est trop fournie cette année pour envisager de tenter le K2. La seconde tentative se passe mieux, nous montons à 7600m sur le Broad Peak (8051m) mais le vent est trop fort pour continuer et espérer trouver des thermiques. Nous devons renoncer au sommet. Il ne nous reste que peu de temps avant la fin de notre overstay et la météo se dégrade. Il n’est pas possible de faire un nouvel essai. Nous rentrons sur Skardu en volant.
Au total, ce fut un voyage de 1550km en vol bivouac, avec de l’alpinisme jusqu’à 6900m et un vol magique à 7960m, le second plus haut dans le monde. Pas si mal pour une expé ponctuée d’entorse de cheville, d’œdème cérébral et de mauvais temps récurrent. On y retourne quand ? 

© Antoine Girard & Damien Lacaze

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