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Phil Bence, spéléologue et cordiste membre du Petzl Team a pu travailler sur l’exploration d’un puits archéologique de 23 mètres découvert lors d’un chantier préventif. Verticalité, obscurité, découvertes, risques à gérer et solutions à trouver... Un chantier loin des standards habituels.

12 Septembre 2019

Accès sur corde et espaces confinés

En 2013 Flo Guillot, archéologue, historienne et spéléologue de renom m'envoie un message : "La société Hadès cherche quelqu'un pour mettre en place une équipe de fouilles de puits.
Ça t'intéresse ?"

Un spéléologue est curieux par nature. Une nouvelle aventure humaine. Oui ça m'intéresse.

Le puits, seul au milieu du chantier.

Je fais équipe en binôme avec Jean Michel, un personnage au parcours atypique !
Ancien militaire de carrière, 15 ans parachutiste au 8° RPIMa, il a ensuite suivi une formation de charpentier puis a repris des études depuis le bac jusqu'à un Master d'archéologie. Formation complétée ensuite par le CQP1 cordiste. Depuis quelques années, il travaille pour Hadès, un opérateur archéologique agréé par l'Etat, devenu une Scop l'an dernier.

Notre mission consiste à fouiller les puits découverts sur des chantiers préventifs ou programmés.
Au début un puits c'est une vague tâche de forme circulaire ou carrée et de couleur différente sur le sol, rien de plus. Le temps les a figé, comblé de terre de cailloux et d'argile.

Un puits c'est intéressant à fouiller car c'est une mine d'informations potentielles. On y trouve enfouie la mémoire de ses anciens utilisateurs...
Un puits, on y tombe des choses par accident.
Un puits, on s'en sert de poubelle quand on n'y puise plus l'eau.
De plus, à partir d'une certaine profondeur le milieu devient anaérobie et humide donc toute matière organique se conserve : végétaux, graines, bois, cuir...
Des conditions exceptionnelles pour un archéologue.

Un puits c'est compliqué à fouiller. Plusieurs risques importants y sont combinés : chute, obscurité, milieu confiné, effondrement, gaz, boue, eau...
Ils sont cependant tous différents : Larges, étroits, plus ou moins profonds, creusés dans un substrat dur ou meuble, il faudra les étayer ou pas.

Mon rôle est d'analyser et prévenir les risques avant et tout au long du chantier, d'assister les archéologues dans leur travail, de gérer la sécurité et d'être prêt à intervenir et porter secours rapidement si nécessaire. Ce qui n'est encore jamais arrivé et tant mieux.
Prudence et prévention sont mères de sécurité...

Chaque fouilleur est équipé d'un harnais complet, casque et éclairage Pixa. Chaque nouveau est formé et briefé sur les risques et les procédures à respecter. Le danger principal étant la chute des matériaux extraits avec les seaux.

Micro traxion, Pro traxion, Ascension une partie du matériel nécéssaire pour l'exploration du puits. 

Après plusieurs missions en France et en Espagne, nous sommes cette fois près de Royan en
Charente maritime, sur le site d'un ancien village carolingien, entre le 7e et 9e siècle.
2 puits y ont été localisés.

On commence par installer et assembler une plateforme spécialement dédiée, faite de structures d'échafaudage.
Ce sera notre base.
Une tour montée au-dessus du puits permet de fixer treuil, antichute et cordes pré-installées sur pro traxion pour un contre poids et une corde d'intervention rapide en cas de besoin.

Les descentes des archéologues se font avec un détecteur multigaz en sécurité et une manche à air nous permet d'injecter de l'air frais quand c'est nécessaire.

Chaque jour 1 à 2 mètres de terre et de gravats sont remontés et évacués. On s'enfonce
progressivement... un travail harassant.

Jusqu'où ? Jusqu'au fond.
Jusqu'à atteindre le fond de cet ouvrage creusé par l'homme. C'est notre but.
Tout ressortir, découvrir ce qu'ils ont pu nous laisser, les traces de leur passage, celles de leur vie quotidienne.

Le puits recèle quelques trésors encore bien conservés.

Ici le sol est un calcaire blanc friable, suffisamment dur pour être difficile à creuser et suffisamment friable pour que ses bords soient instables.
Le fond du premier puits a été touché à 23 m de profondeur !
Seau après seau, au prix de nombreux efforts et dans des conditions difficiles pour les archéologues, plus de 25 m3 de remblai ont été évacués.
Il a livré de nombreuses informations essentielles pour l'étude et la compréhension du site, voire même de superbes cruches miraculeusement intactes.
Un second est encore en cours de fouille au moment où j'écris ces lignes.

Il y a mille et une manières d'exercer le métier de cordiste.
C'est ce qui en fait l'un de son plus grand intérêt je crois. C’est pour moi un privilège et une richesse de pouvoir l'associer à l'archéologie et lui donner ainsi du sens et un intérêt scientifique.

Un travail utile et passionnant à plus d'un titre.

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