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Le secours en montagne en France

Qui que vous soyez, où que vous soyez, quel que soit le jour ou l’heure, vous allez être secouru efficacement, sans que cela ne vous coûte un euro. Mais comment fonctionne vraiment le secours en montagne français ?

5 Janvier 2024

Secours techniques

2019 © PETZL Distribution - Lafouche

Imaginons l’été de la malchance… Vous aviez prévu un tour de France des plus beaux massifs, et il vous est arrivé tuile sur tuile ! Égaré sur un sentier en Corse, un rappel coincé dans une paroi des Alpes, une chute en VTT dans les Vosges, et un genou dans un canyon des Pyrénées. À chaque fois, vous avez composé le 112. Et vous avez vu arriver une fois les pompiers, une fois les gendarmes, une autre les CRS, un hélico bleu, le coup d’après il était rouge et jaune…

À la fin de l’été, sain et sauf, vous vous êtes demandé : « Mais enfin, comment fonctionne le secours en montagne en France ? » Nous allons vous l’expliquer. Mais l’année prochaine, faites quand même un peu attention… 

Deux événements clés 

Il y a en effet aujourd’hui, sur la scène du secours en montagne français, trois acteurs qui se partagent l’affiche. Pourquoi trois ? Rapide retour en arrière sur les deux événements clé dont découle cette organisation. 

Le premier reste l’épopée tragique de Vincendon et Henry sur le mont Blanc, deux jeunes alpinistes pris dans le mauvais temps pendant leur ascension en décembre 1957, et dont la tentative de sauvetage fut un long fiasco et mit en évidence la nécessité d’une meilleure organisation. Avant, les secours en montagne étaient encore à l’ère du bénévolat, assurés par des civils, guides et alpinistes passionnés, avec l’aide des montagnards du coin, des pompiers des communes locales, et de quelques spécialistes de la Police nationale (des Compagnies Républicaines de Sécurité – CRS montagne) appelés en renfort. Après, la circulaire de 1958 relative à la mise en œuvre du secours en montagne confia celui-ci aux moyens de l’État, à savoir gendarmes et CRS. Cette organisation perdura quelques décennies, et l’exclusivité du PGHM sur le massif du Mont-Blanc est une sorte d’héritage de cette époque.

Le second événement est l’évolution qui a conduit les sapeurs-pompiers à passer du niveau communal au niveau départemental, et à disposer alors de moyens humains et matériels plus conséquents leur permettant de devenir, à partir de 2000, acteurs du secours en montagne.

Afin de mettre un peu d’ordre, la circulaire Kihl du 6 juin 2011, signée du ministre de l’Intérieur, et qui abroge celle de 1958, s’adresse aux trois entités avec pour objectif de redéfinir l’organisation du secours en montagne, désormais aux mains de ces trois acteurs, selon des modalités définies dans le plan de secours de chaque département.

2021 © PETZL Distribution - vue d'iCi / Lafouche

Secouriste en montagne… et gendarme

Sur les bancs du CNISAG (Centre national d’instruction de ski et alpinisme de la Gendarmerie) à Chamonix sont formés tous les personnels (brigades de gendarmerie, escadrons mobiles, unités de recherche et équipages hélicoptère) amenés à exercer leurs attributions dans des territoires de montagne. Mais c’est aussi le centre de formation des quelque 280 secouristes en montagne affectés dans les PGHM (Peloton de gendarmerie de haute montagne) des Alpes et des Pyrénées, et dans les PGM (Peloton de gendarmerie de montagne) qui couvrent les massifs anciens (Vosges, Alsace, Jura, Auvergne, Massif central). À savoir, le « H » ne confère ni prestige ni prérogatives particulières, car il n’y a qu’une seule formation et les personnels des PGM et PGHM sont interchangeables et peuvent passer d’une unité à l’autre au cours de leur carrière.

Pour devenir secouriste en montagne chez les gendarmes, il faut déjà… être gendarme, titulaire du PSE2 (Premiers Secours en Équipe) et du DTQM (Diplôme de qualification technique montagne, une formation de base été / hiver d’une quinzaine de semaines). On peut alors se présenter aux épreuves de sélection annuelles. Trois semaines comportant des tests techniques (escalade, glace, terrain varié) proches du niveau demandé au probatoire du diplôme de Guide de haute montagne et des sorties en montagne permettent d’évaluer les capacités, l’autonomie, l’esprit d’équipe et de cohésion, les aptitudes psychologiques… Sur une quarantaine de candidats, une dizaine seront retenus pour intégrer le cursus, soit 10 semaines de formation au CNISAG sur les fondamentaux du secours en montagne.

2021 © PETZL Distribution - Lafouche

 

Depuis une dizaine d’années, comme chez les CRS Montagne, le recrutement est ouvert aux professionnels (guides, aspirants-guides et moniteurs de ski). Si leur niveau de pratique permet quelques adaptations dans le cursus, ils doivent néanmoins réussir le concours externe de sous-officier et effectuer 8 à 12 mois d’École, tout en adhérant aux aspects liés à la gendarmerie, la hiérarchie et l’esprit militaire… Ce qui finalement ne convient pas à tous ! Une fois gendarmes, un test d’évaluation spécifique leur permet de rejoindre eux aussi les bancs du CNISAG pour les 10 semaines de formation « secours en montagne ».

À l’issue, le sous-officier secouriste est affecté dans une unité où il est opérationnel, mais il poursuit sa formation en alternance pour obtenir son BSM (Brevet de secouriste en montagne). Il monte les échelons de grade en grade jusqu’à devenir chef de caravane de secours en montagne, puis chef d’opération d’enquête et de secours. Au-delà, le statut d’officier donne accès aux postes de commandement dans la spécialité, et permet d’être chef d’unité de secours en montagne. À chaque étape, la formation se poursuit au CNISAG à Chamonix avec un stage de niveau et de responsabilité supérieurs.

Médiatisation aidant, on se représente généralement les secouristes du « PG » pendus sous l’hélico en train de réaliser un secours « de l’extrême » en paroi ou au fond d’une crevasse. Mais parce qu’ils sont d’abord gendarmes, ils sont également compétents pour les aspects liés à la police judiciaire. Un accident grave, un décès, une responsabilité d’un tiers pouvant être engagée, et on retrouve les mêmes avec leur casquette d’enquêteur officier de police judiciaire en montagne. Ou alors, assurant des missions de police administrative ou de police du milieu : prévention, contrôle des professionnels, et, en cas d’infraction à la législation sur l’environnement (feu, campement, chien, circulation dans des espaces naturels), verbalisation voire interpellation… Comme des gendarmes, quoi.

Secouriste en montagne… et CRS

Il y a également des secouristes en montagne chez les CRS. L’effectif est même d’environ 200 gardiens et 10 officiers. Pour cela, il faut passer par le CNEAS (Centre national d’entraînement à l’alpinisme et au ski) des CRS à Chamonix, la plus ancienne école de sauvetage en montagne en France. Et sans surprise, pour intégrer la formation montagne des CRS, il faut d’abord être policier. À l’issue de deux années (École de Police puis un an de titularisation), un gardien de la paix frais émoulu peut donc candidater pour devenir Agent Montagne. La sélection dure une semaine (dénivelés, terrain varié, escalade, ski) et sert à repérer des profils « à potentiel » que l’on va se charger de former pour les amener au niveau requis.

Les heureux sélectionnés entament ensuite leur formation. Pour valider le premier niveau, celui d’équipier-secouriste, il faut suivre 19 semaines de stage pour acquérir les fondamentaux de l’alpinisme d’été, de la progression en spéléo et en canyon, les bases du secourisme (PSE1/PSE2, sauvetage), puis 9 semaines de formation hiver (ski technique, sécurité, ski de rando). S’ajoutent quelques jours sur les aspects judiciaires de l’enquête en montagne, car la CRS Alpes/Pyrénées est également compétente sur l’action de police judiciaire.

Les équipiers ont ensuite cinq ans pour devenir – obligatoirement – chef d’équipe. À nouveau 11 semaines de formation feront d’eux des chefs de caravane de secours en montagne de sécurité intérieure (titre commun avec la gendarmerie), autonomes en progression et à même de gérer un secours, été comme hiver, dans sa globalité.

Comme les gendarmes, ils peuvent ensuite évoluer vers des fonctions de cadre, plus éloignées du terrain, où ils peuvent assumer les responsabilités de chef d’opérations de secours en montagne. À noter que les mutualisations entre CRS et gendarmes se multiplient, comme la formation à la recherche cynophile en avalanche, réalisée par le CNEAS au profit des CRS, des PGHM et des PGM. 

2021 © PETZL Distribution - Lafouche

Secouriste en montagne… et sapeur-pompier

On peut aussi devenir secouriste en montagne lorsque l’on est pompier. La spécialité est accessible aux professionnels comme aux volontaires. Ici le secours à personne, qui est somme toute le cœur de métier, représente 100 jours de formation pour un pro, et 30 pour un volontaire. Là, au départ, on a donc des secouristes.

Pour intégrer le GMSP (Groupe montagne des sapeurs-pompiers), le candidat se présente à une journée de sélection (épreuves d’escalade, de dénivelé, terrain varié, ski et glace dans certains départements) qui déterminera s’il est apte à suivre le cursus. Si oui, il commence par 4 jours de stage SMO1, afin de revoir les bases de la progression montagne été et se familiariser avec le matériel de secours, sésame pour s’engager dans le cursus de formation qui le préparera au stage certificatif. Une dizaine de jours de formation avec l’équipe opérationnelle seront complétés d’entraînements personnels afin de pouvoir se présenter, six mois à deux ans plus tard selon les capacités du secouriste, au stage SMO2. Ces deux semaines de formation en rocher, axées sur la progression et les techniques de secours, généralement organisées à Chamonix et encadrées par des formateurs de l’ECASC (École d’application de la Sécurité civile) issus des GMSP des différents départements, produisent un SMO2, c’est-à-dire un équipier opérationnel. En fonction des risques de son secteur d’intervention, il passe ensuite la spécialisation canyon (1 semaine), milieu enneigé (1 semaine), glace (1 semaine). En Haute-Savoie par exemple, ne sont opérationnels que les secouristes ayant fait l’ensemble du cursus, glace inclus.

L’échelon suivant, au bout de quelques années comme équipier, est celui de chef d’unité (SMO3), pour lequel le sapeur-pompier doit avoir le grade de sous-officier (donc à son actif dix jours de formation de gestion opérationnelle et commandement). Il refait alors le même cursus (5 semaines de formation) mais cette fois dans l’optique d’être capable de diriger une opération de secours en montagne.

Les diplômes sont délivrés par la Sécurité civile (ministère de l’Intérieur). À chaque niveau, le cursus compte également 3 semaines par an d’entraînements et formation. Les sapeurs-pompiers ont eux aussi leurs cadres à des grades plus élevés, sur un schéma globalement assez similaire.

À savoir, la spécialité secours en montagne chez les pompiers n’existe que dans les départements comportant des zones… de montagne (elles-mêmes arrêtées par le Préfet). Si vous avez un accident en escalade, en rando, en canyon, etc., mais que vous êtes dans les Calanques, les gorges du Tarn ou le Caroux, par exemple, où il n’y a pas d’unités de secours en montagne, ce sont les pompiers du GRIMP (Groupe d’intervention en milieu périlleux) qui viendront vous secourir. 

2020 © PETZL Distribution - Lafouche

Le féminin de « secouriste »

Dans chacun des trois corps du secours en montagne, les femmes sont également représentées depuis une dizaine d’années. Enfin, même si la porte est ouverte, ça ne se bouscule pas non plus, et avec une douzaine de femmes pour les trois entités confondues, on est encore loin de la parité... Les tests de sélection ne proposent aucun aménagement pour la gent féminine (sauf chez les CRS avec deux kilos de moins dans le sac à dos pour les épreuves de marche). D’ailleurs, même grammaticalement, le féminin de secouriste ne fait pas débat…

Unicité, alternance ou mixité

Les trois unités de secours en montagne se répartissent sur l’ensemble des massifs montagneux du territoire national. Mais laquelle répondra à votre appel ? C’est à ce niveau-là que les choses se compliquent, vu de l’extérieur… Cela dépend du département dans lequel vous vous trouvez, de la semaine, parfois du massif, ou même de l’altitude ! Bon, rassurez-vous, cela ne se joue pas à chi-fou-mi.

Dans chaque département de montagne, le préfet établit et signe la DS ORSEC (Disposition Spécifique - Organisation de la réponse de Sécurité civile) qui comporte un Plan de secours en montagne où sont définies les prérogatives de chaque acteur. Et il y a trois fonctionnements possibles. Les USEM (Unités de secours en montagne) présentes dans le département travaillent ainsi soit en unicité (dans le cas d’un seul acteur présent, par exemple le GMSP dans la Drôme, ou le PGHM à la Réunion), soit en alternance (par exemple en Isère et dans les Hautes-Alpes où alternent le PGHM et la CRS une semaine sur deux), soit en mixité (par exemple en Haute-Savoie, où les secours en montagne sont assurés par des équipes composées d’un gendarme et d’un pompier - hors massif du Mont-Blanc où le PGHM intervient en unicité). Plus rares, certains départements où les trois acteurs sont présents et doivent « se partager » les secours combinent plusieurs fonctionnements, selon la zone concernée, ou même la saison… Quelle qu’elle soit, celle des trois USEM qui assure la permanence est prête à intervenir 24 h sur 24.

Quand le secours vient du ciel 

Aujourd’hui, la majorité des interventions de secours en montagne sont héliportées et médicalisées, ce qui permet une prise en charge rapide des victimes in situ, une évacuation sans délai vers un centre hospitalier en cas d’urgence vitale, ou une extraction par la voie des airs lorsque l’option « terrestre » est inadaptée.

Les USEM disposent pour cela d’une flotte d’État, composée des hélicoptères de la Sécurité civile (rouge et jaune, indicatif « Dragon »), et des hélicoptères de la Gendarmerie (bleu, indicatif « Choucas »). Mais ces moyens aériens, rares et onéreux, ne sont pas exclusivement dédiés au secours en montagne. Ainsi, ceux de la Gendarmerie effectuent également des missions de police, de sécurité publique, etc., tandis que ceux de la Sécurité civile peuvent intervenir sur des transports sanitaires, des feux de forêt… Pour faire simple, ces hélicos d’État sont à disposition, et on les « arme » avec les bonnes unités selon la mission ! Il n’y a donc pas de lien entre la couleur de la tenue des secouristes et celle de l’hélicoptère qui les transporte jusqu’à vous. Par exemple, en Isère, c’est une machine de la Sécurité civile qui est basé à l’aérodrome du Versoud (Dragon38), et ce sont des secouristes du PGHM ou de la CRS qui embarquent pour les missions de secours en montagne, accompagnés d’un médecin urgentiste spécialisé « montagne ». 

2021 © PETZL Distribution - Lafouche

Une conférence tripartite

Vous avez désormais une vision un peu plus précise de l’organisation des différents acteurs du secours en montagne en France. Maintenant, que se passe-t-il concrètement lorsque, votre situation le nécessitant, vous êtes amené à composer le 112 ? Votre appel va sonner au CTA-CODIS (Centre de traitement de l’alerte – Centre opérationnel départemental d’incendie et de secours) du département dans lequel vous vous trouvez. Vous préciserez d’emblée qu’il s’agit d’un secours en montagne, et l’endroit où vous êtes. Votre appel sera aussitôt basculé sur celle des trois entités qui sera l’USEM d’astreinte ce jour-là, dans cette zone-là. Hormis les cas graves et urgents nécessitant un « déclenchement réflexe », il s’engagera alors une « conférence tripartite » entre l’USEM, le CODIS et le SAMU pour analyser la situation, décider – ou pas – de déclencher une opération de secours, et convenir collégialement des moyens à mettre en œuvre (humains, aériens, etc.). Ensuite, vous n’aurez plus qu’à patienter…

À noter que le 112 est aujourd’hui le numéro d’urgence unique européen, et qu’il permet au CTA-CODIS de localiser automatiquement l’appelant sans aucune action de sa part. Le numéro à dix chiffres des PGHM et CRS n’est plus le bon pour appeler les secours, car votre appel devra systématiquement être rebasculé au 112. En revanche, fort de leur contact privilégié avec le milieu de la montagne, vous pouvez les appeler pour des informations sur les conditions de neige, les itinéraires, l’ouverture de refuges, etc. Inversement, cela va sans dire (mais on le dira quand même), n’appelez pas le 112 pour des renseignements sur les conditions en montagne ! 

Le secours spéléo, un monde à part

En 1976, un accident à la grotte de Gournier dans le Vercors a mobilisé des secouristes et spéléos venus spontanément de tous départements prêter main forte lors d’un secours éprouvant et complexe. Celui-ci a alors posé sur la table la question de la nécessaire organisation des secours en spéléologie.

Pourquoi ne pas avoir confié aux équipes de secours en montagne, rompues aux techniques d’évacuation sur corde, les secours souterrains ? Parce que même si la spéléologie appartient au monde de la verticalité, ses sauvetages sont trop spécifiques. Rien n’est pareil sous terre. Pas d’hélico, pas de réseau, pas de jour, pas de sentier bien tracé, et parfois pas moyen de se tenir debout ! La situation est toujours technique et complexe, et nécessite beaucoup de monde. En plus, les secours en spéléo restent rares - une vingtaine par an. Avec cette donne, les plus indiqués pour intervenir sont évidemment les spéléologues eux-mêmes. C’est la conclusion à laquelle tout le monde est arrivé et depuis 1977, l’État a délégué à la FFS (Fédération française de spéléologie) l’organisation des secours, convaincu du rôle incontournable de ses bénévoles pour effectuer la partie souterraine des opérations de secours. Ainsi est né le Spéléo Secours Français (SSF). À noter que les CRS sont formés au secours spéléo, et interviennent régulièrement sous terre, en s’insérant dans le dispositif de secours du SSF.

En cas d’accident, le numéro des secours est toujours le 112, et il s’organise de la même manière une conférence tripartite avec cette fois le requérant (qui doit fournir le plus de précisions possible sur la situation et sur l’état de la victime) et le conseiller technique départemental du Spéléo Secours, afin de dimensionner et d’organiser les opérations. Il faut aller très vite, faire et décider plein de choses en même temps. Mobiliser l’USEM d’astreinte, le maire, le préfet, les spécialistes des communications radio, les sauveteurs bénévoles… Le SS de l’Isère, par exemple, qui fait en moyenne trois secours par an, dispose de 280 sauveteurs, avec chacun des spécialités. Désobstruction (pose d’explosifs pour élargir un boyau au gabarit de la civière), transmission (installation des moyens de communication temporaires entre la surface et l’inframonde), plongée souterraine (en présence d’un siphon), pompage, équipier, chef d’équipe, gestion de sauvetage, sont autant de savoir-faire que peut nécessiter un secours spéléo. Et cette ressource est loin d’être démesurée. Le dernier « gros » secours du SSI en juillet 2019, au gouffre Berger, a mobilisé 156 personnes et duré 36 h… Sous terre, avancer de 150 m avec une civière peut prendre une heure ! Quand la galerie est trop étroite pour brancarder, les sauveteurs s’installent au sol et se font passer la civière, qui avance seule… Quant à la médicalisation, elle est encore plus complexe, en raison des durées exceptionnellement longues des interventions. 

© 2017 Patrice Roth

Sur les domaines skiables

Lorsque vous pratiquez le ski alpin ou le ski nordique, ce sont les prérogatives des stations, via leurs pisteurs-secouristes, que d’assurer les secours sur leur domaine skiable. Le secours en montagne (celui du service public, donc gendarmes, CRS ou pompiers) n’intervient qu’en complément du secours privé, si la situation dépasse les capacités des équipes de la station (accident grave, médicalisation, avalanche, etc.). Dans ce dernier cas, le secouru devra recouvrer les seuls frais liés à l‘intervention des pisteurs et du médecin. C’est à cela que servira l’assurance qu’il n’aura pas omis de prendre.

2023 © PETZL Distribution - Hugo Pedel

Un principe de gratuité

« Faut-il faire payer les secours en montagne ? » La question revient régulièrement, surtout lorsqu’à l’origine d’un secours il y a une imprudence ou de l’inconscience… Mais on ne se résout pas – et tant mieux – à y répondre par l’affirmative. Nos voisins Suisses sont passés d’un service public à des sociétés privées, l’Italie et l’Espagne s’interrogent… En France, hormis sur les domaines skiables des stations, on campe sur un principe fondamental, celui de porter secours gratuitement, sans prendre en considération la capacité de la victime à rembourser les frais potentiellement engagés. C’est le sauvetage de la vie humaine qui prime, un point c’est tout.

Même si cette gratuité pour la victime a tout de même un coût pour la société, c’est aussi la garantie dans l’avenir du maintien de la qualité du service. En plus clair, si les secours étaient payants, ceux qui auraient les moyens seraient biens secourus, mais les autres le seraient avec une formule un peu plus « cheap » peut-être… Le modèle d’organisation du secours en montagne en France est parvenu jusqu’ici à éviter cela.

Et demain ?

Que se passera-t-il quand vous composerez le numéro d’urgence unique ? Verrez-vous arriver sur vous, toutes turbines vrombissantes, un drone qui vous aura géolocalisé avant que vous n’ayez eu le temps de dire ouf, et qui commencera à retransmettre vos constantes médicales à distance, tandis qu’arrivera dans la foulée en quelques minutes un hélico surpuissant en provenance d’une base centrale en plein cœur des Alpes, armé par un corps d’État unique résultant de la fusion des trois entités actuelles et formé dans une seule et même école ?

L’avenir le dira. Mais même si, vu de l’extérieur, le fait d’avoir trois acteurs différents sur la même niche d’activité pose parfois question, ces trois corps, avec chacun ses enjeux politiques et institutionnels, chacun sa culture et son fonctionnement, sont parvenus bon an mal an à trouver un équilibre. Et aujourd’hui, le secours en montagne en France, ça fonctionne.

Alors, une chose à retenir, si vous avez un pépin en montagne et que vous vous résignez à appeler à l’aide, ce que vous appelez, ce sont « les secours en montagne ». Qui que vous soyez, où que vous soyez, quel que soit le jour ou l’heure, vous allez être secouru efficacement, sans que cela ne vous coûte un euro. Et quelle que soit la couleur de leur veste ou de leur machine, ils sont « secouristes en montagne ». 


Article rédigé par Anne Jankeliowitch. 

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